vendredi 29 août 2008

De l'origine des auxiliaires -Deuxième partie

Dans le précédent article[1] , nous avons raconté comment apparurent les auxiliaires et à quel point la situation des étudiants selon l’actuelle convention rappelle celle de ces premiers auxiliaires. Reprenons l’histoire là où nous l’avions laissé.
Six ans après la convention collective de 1969 qui encadre et limite pour la première fois l’embauche d’auxiliaires non syndiqués, le Col Blanc rapporte déjà une augmentation inquiétante de leur nombre. Ils représentent alors de 10% à 15% de la main-d’œuvre dans les deux seuls modules où la convention les autorise : les Sports et loisirs et les Finances. La ville prétexte alors des retards involontaires dans le processus de recrutement d’employés permanents pour justifier leur embauche[2].
De 1975 à aujourd’hui, on a pu observer deux mouvements : d’une part, les auxiliaires améliorent progressivement leurs conditions; d’autre part, la ville obtient d’étendre leur emploi à presque tous les secteurs et cesse finalement toute création de postes permanents. L’amélioration des conditions
De 1975 à 1982, les auxiliaires deviennent membres du syndicat : ils versent des cotisations et peuvent voter aux assemblées. Ils obtiennent des augmentation salariales. On leur accorde de figurer sur une liste d’éligibilité pour la permanence. On leur verse 4% sur chaque paie en guise de prime pour leurs vacances. Toutefois, s’ils ont désormais un droit de grief, on ne peut pas dire qu’ils soient réellement protégés : le Col Blanc de mai 1982 rapporte le harcèlement dont ils sont encore trop souvent victimes, l’absence de protection de leur emploi, le non-paiement des heures supplémentaires, etc[3].
La convention de 1982, définit le droit de rappel accordé aux auxiliaires : après 840 heures travaillées, si l’employeur peut encore couper les heures à quelqu’un parce que le travail manque, il ne peut simplement le congédier. Le travailleur garde son lien d’emploi avec la ville et est inscrit sur une liste d’éligibilité pour les prochaines offres.
En 1994, une nouvelle convention permet de nouveaux gains dont : le paiement des jours fériés, l’augmentation des salaires en mars de chaque année, le droit de s’absenter pour des raisons familiales (maladie ou décès d’un proche)[4].
Et finalement, les progrès des dernières conventions qu’il n’est sans doute pas nécessaire de rappeler ici…
La multiplication des auxiliaires
Pendant ce temps, la ville négocie, de convention en convention, la possibilité de faire travailler des auxiliaires dans toujours plus de secteurs. En 1977, la Voie publique (qui deviendra les Travaux publics) ainsi que les Relations publiques s’ajoutent aux Sports et loisirs et aux finances. Deux ans plus tard, c’est au tour de la Commission d’initiative et de développement économique de Montréal (CIDEM), des Immeubles et des Activités culturelles[5]. Et ainsi de suite…
De cette façon, la ville augmente sans cesse le nombre d’auxiliaires et diminue celui des permanents. En 2000, selon un article du Col Blanc, les auxiliaires sont au nombre de 1800[6]. Six ans plus tard, notre présidente, Monique Côté, évalue leur nombre à plus de 4000, soit plus de la moitié des membres du syndicat[7].
Si le passé est garant du futur…
Au départ, les auxiliaires ne devait être embauchés que lorsqu’il y avait un surcroît de travail et pour une durée n’excédant pas huit mois. Cela devait sans doute rendre leur présence acceptable aux yeux de leur confrères et donner bonne conscience aux instances syndicales. Toutefois, la ville a profité de ce qui devait être une mesure d’exception pour en faire la règle. Toutes les limitations et les restrictions prévues par le syndicat se sont révélées vaines.
Malgré d’important gains, le syndicat n’est toujours pas parvenu, quarante ans plus tard, à effacer toutes les conséquences de cette faute originelle… et le voilà qui accepte la création d’une nouvelle catégorie d’employés non syndiqués : les étudiants ! Puisse la connaissance de l’histoire empêcher sa répétition.
[1] « De l’origine des auxiliaires », Le Colvert, juin 2008.
[2] Houle, Christian. « À la recherche de l’ auxiliaire perdu ! » Col Blanc, février 2000.
[3] Grandchamps, André. « À la recherche de l’homo auxiliarius : les années 80 » Col Blanc, novembre 2000.
[4] Grandchamps, André. « À la recherche de l’homo auxiliarius (suite et fin) », Col Blanc, avril 2001.
[5] Houle, Christian. « À la recherche de l’ homo auxiliarius ! » Col Blanc, juin 2000.
[6] Morin, Daniel. « La précarité chez les cols blancs ça se conjugue avec auxiliaire ! » Col Blanc, février 2000.
[7] DUBUC, Pierre. « Les papes maudits » L’aut’journal, no235, octobre 2006.